L E O F A N Z I N E O Q U I O M E T O L A O C U L T U R E O E N O S A C H E T S

22.1.13

Rendez-vous avec le Thérémine

Ce week-end se déroulait à Lausanne un festival dédié aux musiques électroniques. Jusque là, méga banal, si ce n'est que la spécialité du N/O/D/E est de se consacrer aux instruments "qu'on ne voit jamais sinon" - thérémine en tête - et de proposer une réflexion sur la musique en général. Une belle occasion pour essayer des machins étranges et découvrir au passage tout un tas d'inventions rigolotes sorties de l'imagination d'artistes et d'ingénieurs mélomanes.


N/O/D/E
"Le rendez-vous sonore des instruments intangibles"
Pôle Sud, Lausanne, 19/01/2012

Divisé en de multiples installations/performances/conférences/cours et concerts, le rendez-vous permettait avant tout de se familiariser avec des instruments peu communs. Mieux: on pouvait tout tester soi-même. Accueilli par un tapis sonore (un tapis, sur lequel on marche), le visiteur pouvait jouer de toutes sortes de thérémines ("boîte" dotée d'antennes, que l'on joue en agitant les bras dans le vide) et même la plante verte d'apparence anodine déclenchait une musique d'ambiance lorsqu'on la touchait. Joyeuse cacophonie à tous les étages. C'était le fun.



Mais on n'en restait pas là. Non contents d'amuser le public en lui faisant découvrir des joujoux improbables, les programmateurs N/O/D/E mettaient aussi en avant des inventeurs d'instruments. Car oui, il existe des gens qui fabriquent de nouveaux instruments (et pas que des logiciels). Parmi ceux-ci, le suisse Alain Crévoisier qui se définit comme "Luthier High Tech" ridait son front et prenait des airs biens sérieux en présentant son bébé "Airplane". Pas vraiment destiné à voler dans les airs, le machin est en fait une sorte de tablette qui sert de commande à un logiciel. A part du point de vue de sa technologie, l'"Airplane", qui génère des sons d'ordinateur - donc pas des trucs foncièrement nouveaux au niveau de l'écoute - nous a laissées un peu sceptiques quant à ce qu'il apporte de vraiment neuf à la musique (n'a-t-on pas déjà des ipads et tout un tas d'instruments de commande simples à utiliser sur le marché?). Cela dit, le batteur Christophe Calpini s'en est servi pour faire une chouette démo qui a suffit à balayer pour un temps tous les froncements de sourcils défiants.

Plus cool, l'artiste zurichois Luc Gut qui se produit sous le nom de Murat Ombombe, a fait une performance spectaculaire avec son "Action Tweak". Cet "instrument" - un système de capteurs éparpillés sur son corps - lui permet de créer de la musique grâce à des gestes codés. Visuellement un peu clownesque, sa représentation était bien drôle et sonnait pas mal, en plus. Voyez plutôt la vidéo de son récent passage à Nantes:


Les performances ont donné du grain à moudre à une poignée d'invités invités à une table ronde consacrée aux "instruments du futur". Une thématique en soi intéressante mais qui n'a pas mené très loin. Au sujet de l'avenir de la scène, par exemple, les orateurs ont décrié les artistes "démonstrateur de virtuosité technique" (alors qu'il me semblait n'avoir vu que ça de la journée), et puis ils nous ont rabâché la version romantique de l'artiste révolutionnaire avant que tout le monde s'en aille voir le concert de l'égérie des thérémines Moog, Dorit Chrysler, pétrie de concessions faites au son "futuriste" eighties auquel le thérémine, à mi chemin entre la scie musicale et la voix humaine se marie si bien. Mais cessons de suite toute mauvaise foi, car tout n'était pas à jeter dans le concert de Dorit. Elle a dans son répertoire une jolie interprétation de Saint-Saëns:


Et ce morceaux, quasi exempt de vocalises (enfin!) et qui donne bien envie de se mettre sérieusement au thérémine.


Enfin, après le concert de Dorit, l'interprète Jimmy Virani, accompagné des Beachniks (ukulélé, contrebasse, guitare), a joué des tubes à mélodie percutante ("Apache" des Shadows par exemple) façon hawaïenne. Un peu d'auto-dérision, de la simplicité. Ça passait juste bien après un plein après-midi d'expérimentation musicale.